Les Russes ne sont pas les seuls à construire les plus gros camions dans des conditions difficiles. Dans les années 1950, les Français s’adonnaient au monument saharien. Il « mangeait » 100 litres aux 100 km, roulait à une vitesse maximale de 34 km/h, mais emportait tout et n’importe où. La politique lui a été fatale.
Berliet T100 – 1957 Le Berliet T100 fait toujours partie des plus gros camions de l’histoire. Il pesait 111 tonnes et était destiné au transport de marchandises au Sahara. Les Français en avaient besoin pour la construction de puits de pétrole.
La France appartenait aux puissances coloniales au siècle dernier. L’Algérie tombait également dans sa sphère. Et depuis que les géologues français ont découvert des gisements de pétrole sous des tonnes de sable saharien, ils avaient besoin de quelque chose qui puisse amener la technologie nécessaire sur le site de forage. Mais rien de tel n’existait dans les années cinquante. C’était un cauchemar logistique. Les camions classiques ne pouvaient tout simplement pas accomplir une tâche similaire. Le gouvernement français a donc chargé Berliet, un constructeur national de véhicules utilitaires, de développer un véhicule spécial désert. Berliet envoie d’abord une équipe de techniciens en Algérie pour se familiariser avec les conditions auxquelles sa machine saharienne serait confrontée. Le résultat fut la prise de conscience que ce camion devrait être beaucoup plus grand que les camions ordinaires.
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Le projet, démarré en 1957, reçut la désignation T100 et progressa très rapidement. Et pour ne pas se retenir, Berliet a commencé par commander les plus gros pneus disponibles chez Michelin et a cherché à s’approvisionner en grand nombre de composants auprès de fournisseurs traditionnels. Le premier prototype voit le jour neuf mois plus tard, en octobre de la même année. Il était vraiment étonnant avec ses proportions. Le Berliet T100 mesurait 13,5 mètres de long, cinq mètres de haut et 4,4 mètres de large. C’est comme si vous doubliez la taille des camions précédents. Il n’est probablement pas surprenant que cette montagne d’acier pese 111 tonnes. Un turbodiesel Cummins 12 cylindres d’une cylindrée de 29,6 litres et d’une puissance de 600 ch (441 kW) a assuré leur renouveau.
Berliet T100 – 1957 Ce monument du désert était propulsé par un moteur turbodiesel Cummins 12 cylindres développant 700 chevaux. Mais il lui fallait encore une unité de combustion plus petite pour contrôler la direction assistée.
Il les envoyait aux trois essieux via une transmission semi-automatique Clark. Il y avait quatre marches pour avancer et le même nombre pour reculer. De plus, il y avait un moteur à combustion interne Panhard Dyna plus petit. Cependant, il ne conduisait pas la voiture, il était utilisé exclusivement pour alimenter la direction assistée hydraulique. Sinon, le Berliet T100 serait pratiquement incontrôlable, surtout dans le sable qui allait devenir son domicile. Malgré la puissance massive du moteur, Berliet n’a pas impressionné par sa dynamique. La vitesse maximale s’est terminée à 34 km/h. En revanche, il était époustouflant en termes de consommation, car il demandait au moins 100 litres de diesel aux 100 km. Ainsi, deux réservoirs d’un volume de 946 litres se sont avérés utiles.
Berliet T100 – 1957 Cette voiture a franchi même les terrains les plus exigeants. Mais il n’y avait aucune précipitation pour travailler. Avec le gaz au sol, il atteignait une vitesse maximale de seulement 34 km/h.
Le constructeur automobile a présenté le T100 à un public étonné au Salon de l’auto de Paris en 1957. Et puis sont venus les tests exigeants. Ils ont montré que le moteur de 600 chevaux n’était pas suffisant, alors les techniciens ont ajouté 100 chevaux supplémentaires. Les deux premiers exemplaires sont partis vers l’Afrique sous forme de camions plateaux et le troisième sous forme de benne à dix roues. En 1959, une pièce supplémentaire fut créée et la production « s’arrêta ». La raison était politique. En 1962, après plusieurs années de lutte pour l’indépendance de l’Algérie, le général Charles de Gaulle accorde l’indépendance au pays. Surtout sous la pression des preuves publiées sur le comportement brutal des unités militaires françaises sur le territoire algérien. Cela a pratiquement stoppé les possibilités de la France d’extraire du pétrole au Sahara.
En savoir plus Ekranoplan : le « navire volant » russe a effrayé même les Américains Cependant, les véhicules ont continué à servir pendant plusieurs années. Le premier d’entre eux aurait aujourd’hui besoin d’une rénovation complète. La seconde est revenue en France en 1981 et a été restaurée par le constructeur automobile lui-même, afin de préserver son héritage. Elle fait partie du musée automobile Berliet. La troisième pièce a contribué à la construction de l’autoroute mais a finalement fini à la ferraille, tout comme le quatrième Berilet T100 produit. L’histoire de ce croiseur du désert du Sahara est donc close. Mais à ce jour, le Berliet T100 fait partie des plus gros camions ayant jamais vu le jour. Au moment de sa création, c’était le plus grand jamais réalisé. Même les monuments russes sur roues qui ont industrialisé l’empire communiste ne l’ont pas encore compris.
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