J’ai lu une interview de Martin Dejdar, dans laquelle cet acteur déclare : « Aujourd’hui, on ne peut se moquer de rien. » : « La protection louable de toutes les minorités possibles s’est élevée comme une vague et, malheureusement, a fait sombrer la société majoritaire. »
Il est compréhensible que les artistes soient sensibles à l’état d’humour de la population, car une société prise trop au sérieux n’est pas un public idéal. Mais la question est : arrêtons-nous de rire à cause de la perte de notre sens de l’humour ? Peut-être que le problème réside dans le divertissement actuel, qui n’est pas seulement paralysé par le politiquement correct, mais aussi par l’engagement politique. Il y a des blagues dont seulement la moitié de la population se moque, tandis que l’autre empire. C’est le cas, par exemple, lorsque l’humour consiste à ridiculiser un homme politique dont une partie de la nation ne supporte pas tandis qu’une autre partie parle de l’âme.
Il y a quelque temps, j’ai demandé à Milan Markovič si, selon lui, il y avait quelque chose dont on ne parlait pas. Il réfléchit un instant puis dit la mort de l’enfant. La conviction que l’on peut plaisanter sur pratiquement tout est l’essence même de l’humour noir, qui ne respecte aucun tabou. La tolérance de l’humour noir est un test fiable de la liberté d’esprit dans l’espace public. Le divertissement officiel se termine lorsque l’humour noir de l’espace public est montré à la périphérie, c’est-à-dire parmi les gens qui s’amusent aux dépens des médias, avec qui il n’y a pas de divertissement.
Le rôle du plaisir et de l’humour dans un monde heureux est, bien sûr, différent de celui des temps insouciants. Les crises de toutes sortes nuisent au divertissement, car elles s’accompagnent d’intolérance, d’agressivité, de fanatisme. L’activisme idéologique stérilise de manière fiable l’espace public et élimine le divertissement comme quelque chose de frivole, d’irrespectueux, d’inapproprié. L’humour noir, quant à lui, puise dans les crises les principaux nutriments. Les blagues impubliables sur des politiciens incompétents et leur programme absurde sont une thérapie qui nous aide à faire face mentalement à ce que nous ne pouvons pas influencer, à ce que nous regardons impuissants.
Il faut également garder à l’esprit que le plaisir et l’humour ne sont pas la même chose. Le plaisir peut être superficiel, sans esprit ni humour. Et l’humour n’a pas à être hilarant. Spoutnik russe, qui est aujourd’hui à l’index de l’UE, a publié une caricature humoristique dans laquelle deux soldats russes armés de mitraillettes sont assis sur les ruines de New York conquise et se disent : « Je suis vraiment désolé que nous ayons perdu l’information guerre. » Ceci est un exemple de plaisanterie utile. qui nous permet de comprendre comment ceux dont on se moque nous voient. Si un local proposait cette blague de dessin animé, l’agitation de propagande deviendrait de l’humour noir !
Comédiens, clowns et animateurs de divertissement se souviennent avec nostalgie de l’époque où personne ne faisait appel à eux pour des blagues incorrectes, ils ne devenaient pas la cible de la haine sur les réseaux sociaux. Et ils soulignent que « notre démocratie est fondée sur la liberté d’expression et la liberté de parole ». Vous pouvez être d’accord avec cela, mais il a un petit défaut de beauté. Un comédien ne doit pas être pris trop au sérieux s’il revendique le droit de plaisanter sérieusement. Rire avec l’animateur est facultatif.
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