Quand on disait avant la guerre en Normandie, en France, « ça sent Dior », c’était censé signifier quelque chose de complètement différent de ce qu’il fait aujourd’hui.
Oui, dans la ville de Granville sur la côte normande, Morris Dior – le père de Christian et Catherine – a hérité d’une usine d’engrais, où il importait également des excréments d’oiseaux marins, du guano, entre autres. Et quand le vent soufflait dans la mauvaise direction, il emportait avec lui une forte odeur de son usine jusqu’aux habitations humaines de la ville. Et ces jours-là, les locaux disaient : « Aujourd’hui, ça sent à nouveau Dior. » Mais en même temps, dans le jardin de leur villa familiale, la mère apprend aux deux enfants à cultiver des roses, dont ils finiront par faire l’un des parfums les plus célèbres au monde. En tout cas, j’ai été surpris de découvrir que le parfum de Dior n’était pas toujours aussi doux qu’il l’est aujourd’hui.
Sur la couverture du livre, vous mentionnez que le fantôme de Catherine Dior vous a occupé pendant que vous écriviez. Que voulais-tu dire?
J’admire beaucoup l’auteure canadienne Margaret Atwood, qui décrit l’art de l’écriture comme « négocier avec les morts ». Cela a beaucoup de sens pour moi lorsque j’écris sur Coco Chanel, Christian Dior ou d’autres personnes décédées – en tant qu’auteur, vous fouillez dans les archives pour découvrir ce qu’elles étaient vraiment, tenant souvent des objets ayant appartenu à eux, et visitant les lieux où ils vivaient, comme cette maison de Granville. Et dans le cas de Catherine, vous allez aussi voir les camps de travail, où plus personne ne va, le jardin familial où elle a fait pousser des roses célèbres, et l’appartement parisien où elle s’est cachée des nazis – tous ces lieux ont son esprit, et il m’a accompagné lors de l’écriture.
Lorsque vous avez reçu une offre pour écrire une biographie de Christian Dior après le livre Coco Chanel (2010), on dit que vous n’avez décidé d’écrire qu’après avoir entendu parler de sa sœur cadette. Comment était-ce?
Lorsque j’ai visité les archives de la famille Dior et que je préparais la biographie de Christian, on ne savait pas grand-chose de sa sœur Catherine. L’archiviste de la famille m’a parlé d’une sœur cadette qui cultivait des roses comme ingrédient principal du parfum Miss Dior, et on disait qu’il portait son nom. Cependant, lorsqu’il mentionna nonchalamment que cette sœur avait participé à la résistance intérieure contre l’occupant allemand et qu’elle avait donc été envoyée dans un camp de concentration, Catherine me fascina dès ce moment. On pense parfois que ce livre est l’histoire de Catherine Dior, mais il décrit plutôt l’histoire commune de la fratrie. Après tout, Catherine était la femme que Christian aimait le plus en tant qu’homosexuel, et ils étaient aussi des amis inséparables. J’ai trouvé très intéressant que même si l’histoire de Christian était relativement connue, celle de Catherine était presque inconnue tout le temps…
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