Macron à Bratislava sur la souveraineté européenne – Analyses et constats – Opinions

Il est intéressant de noter que la visite du président français n’a pas attiré l’attention du public dans notre pays.




06/09/2023 12:00

C’est révélateur de notre préoccupation pour les disputes vraiment grenouilles de nos partis politiques d’une part. Et d’autre part, dans le miroir de la division de notre population, que ce soit pour dire la vérité aux Russes ou aux Américains dans un conflit mondial majeur. Dans cette fausse division, dans ce faux récit de la lutte entre l’Orient et l’Occident, nous ne prêtons guère attention à l’espace dans lequel nous sommes véritablement ancrés. L’espace de l’Union européenne et les événements qui s’y déroulent.

L’UE n’est plus Est et Ouest

La présence du président Macron à la conférence GLOBSEC à Bratislava devrait à elle seule attirer l’attention. Mais Macron n’était pas seulement ici pour une visite de courtoisie, il a prononcé un discours fondamental sur la question de la sécurité européenne, de la guerre et d’un éventuel règlement pacifique du continent. J’ai déjà accordé plus d’attention à Macron ici à la Pravda, car il propose le concept de souveraineté et d’autonomie européennes. Et c’est un concept clé qui change la géopolitique globale européenne, mais aussi mondiale. Et Macron s’y tient depuis des années et se fraie progressivement un chemin dans la réalité européenne. Ce n’est pas un hasard si les présidents et premiers ministres du Caucase du Sud et des Balkans occidentaux, ainsi que la présidente de la Commission européenne, Ursula van der Leyen, ont participé à ce GLOBSEC. Les choses bouillonnent en Europe et Bratislava a été le chaudron dans lequel la future architecture de sécurité européenne a sans doute été pré-bouillie. Le discours de Macron était l’ingrédient principal et l’épice de ce chaudron.

Macron a souligné qu’après vingt ans, il ne voit ni n’accepte plus de différences entre « l’ancienne » et la « nouvelle » Europe ou entre l’Est et l’Ouest. Il a même souligné que cette différence n’était qu’un produit temporaire de la guerre froide et du rideau de fer. J’en suis très heureux, car cela dépasse le vieux préjugé, qui était largement cultivé par les atlantistes de droite dans notre pays, mais qui a également pris racine dans le débat journalistique : une sorte de culture orientale, byzantine contre occidentale, qui est, tout simplement, l’autoritaire oriental contre le démocratique occidental. Cette opposition n’existe pas ici, car les sources de l’antidémocratie sont ailleurs. Et Macron l’a bien précisé.

Absence d’architecture de sécurité européenne

Mais la partie essentielle de son discours est la déclaration selon laquelle l’UE n’a pas encore été en mesure de formuler son propre système de sécurité. Ou pour le dire plus strictement, elle l’a laissé entre les mains de l’OTAN. Même en tant que membre de la commission des affaires étrangères du Parlement européen, j’ai constamment souligné que l’attractivité de l’UE pour ses voisins modifie la situation géopolitique sur le continent et que ce changement provoquera un contrecoup.

Ce sont les accords d’association de l’UE avec les républiques post-soviétiques qui ont toujours provoqué des tensions, car la Russie les comprenait clairement comme la fuite de ces pays de l’influence économique de Moscou. Toutes les manifestations anti-régime dans ces pays se sont déroulées sous les drapeaux de l’Union européenne (je n’en ai enregistré aucune américaine). Cependant, l’UE n’a pas été en mesure de fournir la moindre garantie de sécurité et de libre prise de décision à ces pays en quête d’une coopération étroite ou d’une entrée directe. Et Moscou a toujours exercé son influence directement, par la coercition, à travers les minorités russes dans les États individuels ou les guerres dites hybrides. Et si nécessaire, également par une intervention militaire directe. L’UE n’avait pas de réponse à cela. En effet, l’UE elle-même ne dispose toujours pas de sa propre architecture de sécurité. L’OTAN est un traité de défense collective et n’est pas basé sur l’UE, mais sur les relations contractuelles des États individuels.

Des pas vers la « souveraineté européenne »

C’est exactement ce que Macron essaie de changer. Son idée originale, il y a environ cinq ans, a pris des contours beaucoup plus clairs après l’agression russe contre l’Ukraine. A Versailles, l’UE a adopté une déclaration dans laquelle elle s’est engagée pour la formation d’une architecture européenne de sécurité, qui devrait être la base de la souveraineté et de l’autonomie européennes. Son résultat est une opération incroyablement rapide, par laquelle l’UE s’est débarrassée de sa dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie en quelques mois, a fourni à l’Ukraine un programme d’aide de 67 milliards de dollars (dont 14 milliards d’aide militaire directe) et a adopté plus d’une douzaine de programmes de sanctions anti-russes. Je pense que cela a été un coup dur et un choc pour les plans de Poutine, car dès le début, il a misé sur la désintégration, voire la désintégration de l’unité européenne. Cependant, au contraire, il est devenu encore plus fort.

La souveraineté européenne deviendra réelle si l’UE devient le sujet juridique de tous les traités qui concernent l’architecture de sécurité du continent. Et puis l’UE peut aussi assumer la responsabilité du sort du continent. Qui est encore largement entre les mains des États-Unis.

Et donc à Bratislava, Macron a pu aller un peu plus loin dans son concept de souveraineté européenne : Son véritable noyau est le projet de Macron de faire de l’UE elle-même signataire des traités de sécurité : car jusqu’à présent seuls les USA et la Russie, ou d’autres grandes puissances , ont toujours été signataires. Mais pas l’UE. La souveraineté européenne deviendra réelle si l’UE devient le sujet juridique de tous les traités qui concernent l’architecture de sécurité du continent. Et puis l’UE peut aussi assumer la responsabilité du sort du continent. Qui est encore largement entre les mains des États-Unis. Et Macron parle ouvertement et crûment du fait qu’après l’expérience avec Trump, l’Europe ne peut pas « être dépendante de la volonté des électeurs américains… ».

Si je l’apporte chez nous, même la sécurité slovaque ne devrait pas dépendre de la volonté des électeurs étrangers. Il est donc dans l’intérêt vital de la Slovaquie de soutenir le projet de Macron. C’est en fait le seul moyen qui puisse nous sortir du dilemme direct entre l’impérialisme russe et la dépendance sécuritaire transocéanique…

Napoleon Favre

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